Europe Écologie et la Région Savoie
La philosophie écologiste sur la question des institutions territoriales peut être résumée en trois concepts, porteurs de trois valeurs : subsidiarité (proximité), péréquation (solidarité), régionalisme (humanité). L’horizon, le sens, de ces trois valeurs est la démocratie, et elles s’inscrivent dans une vision ascendante du pouvoir.
C’est à la lumière de ces principes qu’il faut regarder les spécificités savoyardes.
Pour Europe Écologie, la définition du territoire n’est pas une fin en soi, mais ce n’est pas un tabou.
Les seules questions à se poser :« Le découpage actuel assure- t-il la meilleure proximité démocratique ? » et « Les problèmes locaux seront-ils mieux traités à tel niveau qu’à tel autre ? »
1. Selon le principe de subsidiarité, la responsabilité d’une action publique doit être allouée à la plus petite entité capable de résoudre elle-même le problème posé.
Ainsi, la question sera de savoir à quel niveau, de Lyon ou de la Savoie, seront le mieux traitées les questions suivantes :
– Quel avenir pour l’agriculture de montagne ? Problème lyonnais ou savoyard ?
– Comment maîtriser le sur-équipement et l’urbanisation des stations de ski, la multiplication des canons à neige? Lyon ou Savoie ?
– Comment gérer les réserves d’eau en montagne?
– Qui est le mieux placé pour mener les discussions transfrontalières avec nos voisins de Genève ou de la Vallée d’Aoste ?
– Quels transports pour les alpins ?
– Nouvelles orientations des parcs régionaux existants ou à créer ?
– Quels supports pour l’industrie du décolletage, la filière solaire autour de l’INES ?
Selon le principe de subsidiarité le lieu de la prise de décision doit être proche du territoire où elle a son impact, c’est à partir de là que doit s’organiser le débat politique et citoyen.
Aujourd’hui, ce sont les départements savoyards qui, grâce à leurs ressources et à la clause de compétence générale, prennent en compte la plupart des problèmes ci-dessus. Une très large majorité des élus départementaux sont prêts à la fusion des 2 départements en une nouvelle entité qui aurait des compétences régionales, dès lors que la clause de compétence générale sera retirée aux départements.
Si Europe Écologie arrive à la présidence de Rhône-Alpes et compte-tenu de la réforme territoriale en cours, elle aura nécessairement à aborder, sur la base du principe de subsidiarité et d’efficacité le redécoupage du territoire : rapprochement avec l’Auvergne déjà en discussion, absorption du département du Rhône par la métropole lyonnaise, fusion Drôme-Ardèche et projet de région Savoie…
Elle aura à dire à quel niveau seront le mieux traités les problèmes spécifiques de la Savoie. Elle se prononcera sans tabou et sans a-priori, après avis des populations concernées.
2. Le fédéralisme différencié est le second principe fondamental sur lequel s’appuie EE pour mener sa réflexion sur l’organisation territoriale. Ainsi, lorsque Cécile Duflot et les Verts ont été auditionnés par la commission Balladur, la région Savoie a été citée comme exemple d’application.
Ce principe prend le contre-pied radical du système actuel, centralisé et unitariste. Il souhaite remplacer la pyramide des pouvoirs descendants du centre vers le local par une pyramide des pouvoirs ascendants de l’échelon géographiquement le plus petit vers le plus grand.
La « taille européenne » des régions est un mythe. Une grande diversité existe en Europe. Ceux qui veulent des régions toujours plus grandes veulent élargir leurs pouvoirs et rétablir une bureaucratie régionale. Ce n’est pas ce que nous voulons.
Rejetant l’unitarisme uniformisant qui prévaut en France, le fédéralisme différencié suggère au contraire l’idée, suivant le modèle espagnol ou canadien, que chaque région pourrait avoir un statut différent, des compétences différentes, en fonction de ses revendications.
Enfin, pour EE, la région doit être avant tout un espace politique de débat et de prise de décisions démocratiques, un espace de solidarité et non une entreprise en concurrence avec les autres régions. La péréquation entre régions riches et régions pauvres doit être un principe réellement appliqué et beaucoup mieux organisée.
La quasi-totalité des régions alpines à cause de leur histoire et de leurs spécificités montagnardes ont un statut d’autonomie reconnu : la Vallée d’Aoste, le Frioul, le Haut-Adige en Italie et toutes les régions fédérales de l’Autriche. Seule la Savoie est cantonnée dans des compétences départementales.
Si nous prenons l’exemple de la Vallée d’Aoste (pays de nos « cousins » car ils ont toujours fait partie de la Savoie avant son annexion), elle a un statut d’autonomie depuis 1946, c’est-à-dire un parlement et un exécutif. Cette région a su protéger ses richesses naturelles, son développement touristique, son urbanisme, son patrimoine et ses traditions de manière exemplaire car les partis éco-régionalistes y sont majoritaires; à partir du moment où les problèmes des citoyens sont traités au plus près, pourquoi iraient-ils voter pour d’autres?
La Vallée d’Aoste, qui compte 150.000 habitants seulement (1.100.000 en Savoie) a un PIB par habitant qui est l’un des plus élevé d’Italie. Ses compétences sont très étendues, Rome n’exerçant que les compétences régaliennes. Son budget est de 2 milliards d’euros pour 150.000 ha à comparer au budget de Rhône-Alpes de 2,4 milliards d’euros pour 6 millions d’habitants.
On voit là tout l’écart qui sépare notre système régional de celui des pays qui nous entourent et dont les régions gèrent elle-même de 60% à 90% de leurs recettes fiscales contre 10 à 15% en France. EE se mobilisera pour faire évoluer les compétences et la fiscalité régionales (fiscalité que le gouvernement est en train d’assécher pour la remplacer par une « dotation » soumise au bon vouloir du gouvernement) EE conduira l’évolution nécessaire vers un pouvoir normatif, voire législatif des régions, bref, pour construire un parlementarisme régional.
Europe Écologie, née l’association des Verts avec Régions et Peuples solidaires, porte ainsi l’espoir d’une région Savoie qui sera dirigée un jour par les écologistes et les régionalistes.