La complenta dè Mandrin

 

Nos érion vint ou trenta
bregans dens una benda
tôts arbeillas de blanc
a la moda de, vos me sentéd…
A la moda dus marchiands.

La premiéri rapina
que fasì dens ma via,
l’est d’aveir rapinâ
la borsa d’un, vos me sentéd…
La bors’ d’un encurâ.

Rentrì dedens la chambra
mon Diô que l’ére granta !
Dj’y trovì mëlle écus,
dj’y btâ, vos me sentéd…
dj’y trovì mëlle écus,
dj’y btâ la man dessus.

Rentrì dedens un’ autra,
mon Diô que l’ére yauta !
De robes e de mantiôs,
dj’en chargì treis, vos me sentéd…
de robes e de mantiôs,
dj’en chargì treis chariots.

Dje los portì per vendre,
a la féire en Olanda.
Los vendì a bon contio
yl m’aviont pas rien, vos me sentés…
los vendì a bon contio,
yl m’aviont pas rien coûtâ.
Çlos monsius de Grenoblo,
avouè lors longes cottes,
e lors berets carrâs,
m’aviont dabor, vos me sentés…
e lors berets carrâs,
m’aviont dabor jugias.

Yl m’ont jugia a pendre,
ah ! Y est sevér’ a sentre !
A pendre e atranglar,
sus la pllaci du, vos me sentéd…
a pendre e atranglar,
sus la pllaci du marchà.

Poyà sus la potenci,
dje reguetì la Franci,
veyì mos compagnons,
a soûta d’un, vos me sentéd…
veyì mos compagnons,
a soûta d’un boueisson.

Compagnons de misére,
modâd dire a ma mâre,
que le me vèye pués plus,
su un meinà, vos me sentéd…
que le me vèye pués plus,
su un meinà perdu.


Traduction : Laurent Damé

 

 


La complainte de Mandrin

 

Nous étions vingt ou trente
Brigands dans une bande
Tous habillés de blanc
A la mode des, vous m’entendez . . . .
Tous habillés de blanc
A la mode des marchands.

La première volerie
Que je fis dans ma vie,
C’est d’avoir goupillé
La bourse d’un, vous m’entendez. . . .
C’est d’avoir goupillé
La bourse d’un curé.

J’entrais dedans la chambre,
Mon Dieu, qu’elle était grande !
J’y trouvais mille écus,
Je mis la main, vous m’entendez. . . .
J’y trouvais mille écus,
Je mis la main dessus.

J’entrais dedans une autre,
Mon Dieu, qu’elle était haute !
De robes et de manteaux,
J’en chargeais trois, vous m’entendez. . . .
De robes et de manteaux,
J’en chargeais trois chariots.

Je les portais pour vendre,
A la foire en Hollande.
J’les vendis bon marché,
Ils ne m’avaient rien, vous m’entendez. . . .
J’les vendis bon marché,
Ils ne m’avaient rien coûté.
Ces Messieurs de Grenoble,
Avec leurs longues robes,
Et leurs bonnets carrés,
M’eurent bientôt, vous m’entendez. . . .
Et leurs bonnets carrés,
M’eurent bientôt jugé.

Ils m’ont jugé à pendre,
Ah ! c’est dur à entendre !
A pendre et étrangler,
Sur la place du, vous m’entendez. . . .
A pendre et étrangler,
Sur la place du marché.
Monté sur la potence,

Je regardais la France,
J’y vis mes compagnons,
A l’ombre d’un, vous m’entendez. . . .
J’y vis mes compagnons,
A l’ombre d’un buisson.

Compagnons de misère,
Allez dire à ma mère,
Qu’elle ne me reverra plus,
J’suis un enfant, vous m’entendez. . . .
Qu’elle ne me reverra plus,
J’suis un enfant perdu.

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